Victor, Victoria

C’est l’histoire d’une chanteuse au chômage dont la vie est bouleversée par la rencontre de Toddy, un homme extravagant. Avec son aide, elle devient Victor, un chanteur à sensation dans les boîtes de nuit à Paris. Elle connaît très vite le succès mais les choses se compliquent de façon comique lorsqu’elle rencontre l’amour de sa vie, un gangster macho de Chicago…

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Pays : Etats-Unis 

Réalisateur : Blake Edwards

Année de sortie : 1982

Distribution : Julie Andrews (Comte Victor/Victoria Grant), Robert Preston (Carroll Todd), James Garner (King Marchand), John Cassady (juke), Jay Benedict (Guy Langois), Peter Arne (Labisse), Michael Robbins (le manager de l’hôtel), Lesley Ann Warren (Norma Cassady), Alex Karras (Bernstein), John Rhys-Davies (André Cassell).

Durée : 2h10 mn

Public : tous publics

Contexte historique : Paris des années 1930

 

Attention : Le commentaire qui suit est une analyse croisée de trois films, traitant des mêmes thèmes :

  • Certains l’aiment chaud de Billy Wilder (1959)
  • Tootsie de Sydney Pollack (1982).

 

Trois petits bijoux qui n’en font qu’un….

C’est incroyable, je n’avais pas fait le rapprochement entre ces trois films, et pourtant deux d’entre eux que j’avais vus dès leur sortie, sont de la même année (en 1982 pour Victor, Victoria et Tootsie). C’est exactement la même histoire, à quelques légères variantes près : un artiste fauché et plus ou moins de seconde zone, accepte en désespoir de cause, de se travestir pour trouver un rôle. Il s’habitue alors assez facilement à  la nouvelle situation, d’autant qu’il connait un franc succès. Mais il se fait bien vite prendre à son propre jeu car il tombe amoureux d’une personne du sexe opposé, qui le prend pour sa confidente ou s’interroge sur sa propre sexualité (Victor, Victoria).

Toutes trois sont des comédies désopilantes, à commencer par la plus ancienne – « Certains l’aiment chaud » – qui est peut-être une de celles qui a finalement le moins vieilli et qui a été sacré « film le plus drôle de tous les temps » par l’ American Film Institute (Tootsie étant le second !).

Il est possible de les montrer tous les trois à des enfants dès l’âge de 8 ans, sans qu’il n’y ait de scène choquante (mise à part la scène de Tootsie à la minute … mais rien de visible) ou de difficulté de compréhension particulière. Quelques « abus de langage » (folle, homo…) sont malgré tout présents.

A l’exception de Tootsie, il s’agit de comédies musicales avec des bandes originales mythiques (on pense bien évidemment à « I wanna be loved by you » de Marylin Monroe) et d’excellente qualité (dans Victor Victoria). On peut en tant qu’adultes accrocher plus ou moins au registre, mais en tous cas pour les filles, c’est d’ores et déjà une garantie de réussite.

Voilà pour les principales similitudes ; ensuite restent l’originalité et le registre propre de chaque film ; je ne traiterai ici que des traits de caractère ou des scènes qui m’ont le plus marqués :

  • pour « Certains l’aiment chaud », c’est immanquablement le personnage de Marylin Monroe qui est mémorable. Au-delà du fait qu’elle soit absolument sublime, elle joue la « blonde » dans toute sa splendeur. Il est bon de faire remarquer alors à nos chérubins, qu’ils n’ont rien inventé avec leurs blagues lourdes sur les blondes ….

On la connaissait déjà dans « les hommes préfèrent les blondes », mais le personnage est ici plus poignant je trouve, notamment dès les premières minutes du film où on la voit en train de piccoler. C’est une belle allégorie permettant de montrer que parfois le physique ne rend pas forcément des services et en tous cas, pose d’autres difficultés….Il y a donc une sorte de justice….(c’est une brune qui parle…)

Et puis, il y surtout la dernière réplique du film (que je ne dévoilerai pas) mais qui est absolument géniale, et qui laisse immanquablement une bonne impression même à celui qui aurait pu trouver quelques longueurs au film.

Enfin, la réalisation en noir et blanc (alors que la couleur existait, mais elle risquait de faire ressortir le maquillage des deux héros) est magnifique de même que le scénario du film autour d’une course poursuite par la mafia, est peut-être un peu plus facile d’abord pour les enfants. Les scènes de la fête dans les couchettes de train comme celle de la séduction sur le yacht sont purement extatiques.

  • pour « Victor, victoria », remake de film allemand de 1933, j’ai vraiment aimé la complicité entre les personnages, l’amitié et la tendresse grandissante entre Julie Andrews et Robert Preston. Le film est sans aucun doute burlesque mais on se laisse prendre au jeu. La vision du Paris des cabarets des années 30 par un américain est assez illustrative des clichés français.
  • pour « Tootsie » – surnom que la mère de Dustin Hoffman donnait à son fils – c’est différent. C’est un film plus classique dans son style et plus contemporain. Les textes et situations sont peut-être plus adaptés pour des enfants un peu plus âgés. Néanmoins, la personnalité du personnage ainsi que l’interprétation qui en est faite par Dustin Hoffman est géniale. C’est un bon exemple à montrer aux enfants de performance d’acteur non seulement dans l’interprétation du texte, mais dans la gestuelle, les mimiques et tous les détails de comportements. Ce le sera d’autant plus si l’on peut également leur montrer des prestations différentes de ce comédien comme dans « Les hommes du Président » ou « Rainman » .

 

Mais trois petits bijoux à voir tous les trois.

Alors pourquoi, si ces trois films sont similaires, les montrer tous les trois à nos enfants. Ne faut-il pas choisir celui que l’on préfère et privilégier d’autres films? C’est bien évidemment possible, notamment si l’on dispose de peu de temps.

Néanmoins, faire l’expérience des trois me paraît intéressant.

D’abord, les enfants sont plus sensibles à la répétition que nous. Ne sont-ils pas capables de regarder en boucle les mêmes dessins animés ?

Et puis, c’est très intéressant de voir les mêmes thèmes traités de différentes manières en fonction des époques, des situations et même des comédiens. Ici, cela vaut vraiment la peine compte tenu du thème majeur de l’homosexualité et du travestissement, traités de façon totalement burlesque, mais néanmoins instructive.

Une précision s’impose car on tombe sur des conceptions éducatives très personnelles et hautement sensibles : au risque d’en choquer certains, mon parti-pris a toujours été, lorsque la question se posait, de présenter l’homosexualité comme quelque chose de tout à fait naturel, même si cela n’est pas mon propre choix. On ne peut élever, il me semble aujourd’hui, des enfants dans l’intolérance, notamment compte tenu des évolutions de société en cours et surtout à venir.

Il faut donc à mon avis aborder le sujet assez librement et ces trois films en sont un bon prétexte, plutôt que les situations où nos petits reviennent de la cour de récréation en larmes parce qu’ils se sont fait traités de « pédé ».

Ce qui est intéressant est à travers ce regard des femmes de sentir l’importance des attitudes sexistes et les humiliations fréquentes des femmes par certains hommes.

Mais au-delà de ces thèmes, c’est la réflexion sur l’identité sexuelle de chacun qui me paraît essentielle. Chacun de ces trois films met en place des situations où des êtres travestis font naître de l’amour chez des êtres de même sexe qu’eux. De façon plus générale, ils montrent comment pour une femme comme pour un homme, toute ambiguïté sexuelle nous déstabilise et soulève des inquiétudes quant à notre place dans la société.

Néanmoins, l’issue des trois films sont des grandes leçons de tolérance et devraient nous rassurer sur le fait que, sans pour autant changer d’identité sexuelle, nous avons tous une part masculine et une part féminine et que la ligne qui sépare le masculin du féminin peut être aisément franchie. Une fois que l’on sait cela et que nos enfants l’ont compris, bon nombre de situations paraissent moins problématiques ou ridicules et peuvent être relativisées. Michael dans Tootsie   explique : « avec les femmes, j’ai été un homme meilleur en tant que femme, que je ne l’ai jamais été en tant qu’homme ». Hommes et femmes vont peut-être finir par mieux se comprendre…

 

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