Il était une fois une reine moribonde qui a fait promettre au roi de n’épouser qu’une femme plus belle qu’elle. Dans tout le royaume, une seule personne peut se prévaloir d’une telle beauté, sa propre fille. Revêtue d’une peau d’âne, la princesse désespérée s’enfuit du château familial.

Pays : France
Réalisateur : Jacques Demy
Année de sortie : 1970
Distribution : Catherine Deneuve (La reine bleue / La princesse / Peau d’âne), Anne Germain (La princesse / Peau d’âne (chant)), Jacques Perrin (Le prince), Jacques Revaux (Le prince (chant)), Jean Marais (Le roi bleu), Delphine Seyrig (La fée des Lilas)….
Genre : Conte musical
Durée : 1h25
Age recommandé : à partir de 6 ans
Public : Fille, à n’en point douter
Niveau de difficulté culturelle (de 0 à 5) : 1, c’est un conte ne l’oublions pas, donc de difficulté particulière
Contexte historique : Le temps des princes et des princesses, au pays des contes
Principaux thèmes traités : amour, inceste, pouvoir, prince, princesse, apparences
Le conte aux mille facettes
Peu d’Ane est un film vraiment à part. Des contes musicaux, il n’y en a déjà pas tant que cela mais ici on est dans l’original de chez original.
Il y a déjà l’esthétique très colorée, nouvelle pour l’époque et qui s’inspire des mouvements pop art et peace and love, que Jacques Demy avait découvert aux Etats-Unis, lors de son précédent tournage.
Le film a aujourd’hui forcément pris un coup de vieux, mais le fait que ce soit un conte, fait que cela passe ; les chevaux peints en rouges et bleus ne nous dérangent pas plus que cela et les hélicoptères et vieux téléphones anachroniques nous font même sourire.
Ce qui sauve le tout c’est la poésie à tous les endroits , des robes couleurs de lune à la bulle de verre en guise de cercueil…. Tout entretient la confusion entre le réel et le merveilleux, entre le merveilleux et le réel ….dans une jolie farandole.
La musique y fait également pour beaucoup. Michel Legrand s’est déchaîné avec une vingtaine de chansons toutes aussi mythiques les unes que les autres, chantées par Anne Germain sur des paroles de Jacques Demy lui-même. Sans compter la palette d’acteurs tous excellents ….Deneuve, Perrin, Marais, Seyrig…. Quel palmarès …jusqu’à l’apparition de Coluche en paysan injurieux.
Bref, un vrai bonheur à partager entre générations. On ne peut que succomber.
A souligner toutefois, derrière l’apparente légèreté, l’évocation de certains thèmes pas toujours évidents à commencer par le thème de l’inceste. Ici les choses sont claires et chantées « on épouse pas son Papa », et c’est finalement une jolie façon de faire passer le message.
Le conte aux mille references
« Peau d’Ane » est bien évidemment inspiré du conte homonyme de Charles Perrault de 1694, mais il recèle aussi de nombreuses références. On pourra citer par exemple :
- Lorsque Peau d’âne arrive à la ferme lors de sa fuite, tous les personnages sont comme endormis, figés dans leur activité, comme dans « La Belle au bois dormant » ;
- La « Vieille » qui accueille Peau d’âne crache des crapauds, tout comme l’aînée dans Les Fées. Elle fait référence au Petit Chaperon rouge en s’adressant au prince ;
- Deux valets de ferme se moquent de Peau d’âne en la surnommant « Cucendron », comme le fait l’aînée des demi-sœurs de Cendrillon ;
- Le « bal des chats et des oiseaux », organisé par la reine rouge, doit accueillir le marquis de Carabas, personnage apparaissant dans Le Chat botté ;
- L’univers du château bleu, où le végétal envahit l’architecture et où les statues sont vivantes, le réalisateur puise son influence dans l’univers du cinéma de Cocteau, notamment La Belle et la Bête (1946). Le choix de Jean Marais pour le rôle du roi bleu est d’ailleurs lié à cette référence.
- Le cercueil de verre, destiné dans le film à la mère défunte de l’héroïne, est une référence à Blanche-Neige des frères Grimm
- Le miroir de Peau d’âne, qui lui révèle à distance la réaction de son père après sa fuite, est une référence au miroir magique de la Belle et la Bête, capable de révéler par l’image des vérités lointaines.
- ….
Il y a aussi de l’Apollinaire (les vers lus par le roi Bleu à sa fille), du Cocteau et enfin du Saint-Exupéry, avec le dialogue entre le prince et la rose, rappelant étrangement un autre prince, plus petit….
Le film s’achève sur les derniers vers du conte original :
« Le conte de Peau d’âne est difficile à croire,
Mais tant que dans le monde on aura des enfants,
Des mères et des mères-grands,
On en gardera la mémoire. »
En montrant ce film à nos petits, la relève a toutes les chances d’être assurée et la transmission perpétuée.
La scène culte : La scène de fabrication du cake d’amour
Mes p’tits trucs à moi :
- Faire un quizz avant le film pour retrouver toutes les références aux contes de Charles Perrault et autres
- Utiliser les couleurs de soleil, de lune et autres dans la vie de tous les jours pour évoquer ses émotions : mettre la table couleur de rire, ranger sa chambre couleur de calme….
- Recette du cake d’amour à réaliser après le film : « Les ingrédients sont les suivants: de la farine, quatre oeufs, un bol de lait, du sucre, une main de beurre, un souffle de levain, une larme de miel, un soupçon de sel. Laissez cuire une heure, non sans avoir glissé dans la pâte un présent pour votre fiancé(e)… »
- Une petite virée costumée dans les Chateaux de la Loire, devient indispensable : château de Chambord (château rouge), château du Plessis-Bourré (château bleu), château de Neuville , Gasny et Senlis.
Précautions à prendre
A petites doses, car l’on peut devenir assez facilement addict
Si vous avez aimé, vous pouvez voir…
Les demoiselles de Rochefort (1967)
Les parapluies de Cherbourg (1964) (en plus triste)
Jacquot de Nantes d’Agnes Varda (1990)
Dans le registre « les contes au cinéma » : « La Belle et la Bête » de Jean Cocteau (1946), “Excalibur” de John Boorman (1981), “Il était une fois” des studios Walt Disney (2007)